Gemma est une super-héroïne, qu'elle le croit ou non. Quelle le veuille ou non. Rencontrée lors d'une soirée de détente, dans une ruelle, elle a sauvé mon portefeuille et je l'ai remercié en l'accompagnant dans un hôtel à proximité. Je connaissais le propriétaire, et lui ai négocié un prix. Je me doutais déjà à ce moment-là que l'argent n'était pas un problème pour elle, mais je ne pouvais rien faire de plus. Je n'avais pourtant aucune idée de la profondeur de ses poches, ni de la grandeur de son existence.

Macaria, l'une des déesses de la mort du panthéon grec, et non je n'arrive toujours pas à comprendre les différentes nuances des types de mort. Elle m'a trouvé lorsque mon pouvoir s'est déclaré et que tous les autres sont venus me hanter. Elle a su, d'une façon ou d'une autre, que j'avais besoin d'aide, et elle a fait bien plus que ce que j'aurais pu espérer. Elle m'a accueilli chez elle, m'a offert son hospitalité et une bonne dose d'informations difficiles à digérer. Je pensais avoir besoin de ça pour comprendre. Ça n'a entrainé que plus de questions.

Elle m'a aidé à contrôler ce pouvoir impossible, mystérieux. Encore maintenant, je m'appuie énormément sur elle pour ne pas congeler tout le Commissariat. Je ne pourrais jamais repayer ce qu'elle m'a offert, cette dette de gratitude, mais également tout l'argent qu'elle a aligné pour moi. Je compte bien essayer, ce n'est pas dans ma nature d'accepter la charité. Suffira-t-il d'une vie pour y parvenir ? Allez savoir, j'en ai peut-être désormais plusieurs et je n'en ai simplement pas encore conscience.

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Mon regard aurait pu se poser sur John avant, durant la journée de mon entrée à l'académie, mais j'étais tellement nerveux que j'ai tout juste mémorisé les visages du gradé et des instructeurs qui nous ont accueillis. Non, il m'aura fallu attendre de voir ses épaules traverse "l'étroit" encadrement de la porte de ce qui deviendrait notre dortoir pour véritablement enregistrer son existence. Lui, moi, coincés dans une pièce aux deux lits franchement pas bien larges. Ça ne pouvait pas se dérouler autrement.

Le jeune nerveux mais impatient que j'étais a profité sans honte du calme de John. De cette sagesse, comme s'il était là depuis des dizaines années. Pendant un temps, je me suis demandé s'il n'était pas un instructeur infiltré, mais ces questionnements ont rapidement été éclipsés par le quotidien, l'apprentissage, l'entrainement, et bientôt le badge épinglé à ma poitrine comme à la sienne. Les uniformes que nous partagions comme des jumeaux, avec les autres officiers. Je sais que je peux me reposer sur lui en cas de doute ou de problème, je sais que je peux m'en remettre à son jugement. Et il peut avoir une foi sans faille à ma loyauté, à mo bon sens. Je suppose que d'une certaine manière le destin nous a réuni et, quand bien même je ne saurais dire pourquoi, je me dis que peu importe la raison, il a bien fait. Il a bien pensé.

Aujourd'hui, même après des années de séparation, même après s'être réunis dans un même commissariat, même après les attaques, les dieux, le confinement et la crise, je n'ai jamais remis en question ma confiance en lui. Il est l'un de mes plus vieux amis. Il a participer à ce que je suis aujourd'hui. Si je savais qui il est réellement, je me souviendrais de la leçon de Macaria : les gens ne sont pas toujours ce qu'ils présentent. Mais les muscles ne sont-ils pas l'expression de la force qu'il dissimule ? Ces valeurs ne prouvent-elles pas que j'ai fait le bon choix ? Suis-je vraiment dans le flou, au final ?

Jonah est une surprise. Jonah est un risque. Jonah est une question, mais surtout il est la bouffée d'air qui souffle la glace de mes angoisses.

C'est Macaria qui nous a présenté. Lui, son fils adoptif espagnol. Moi, son protégé glacial. Lui, ce grand enfant surexcité. Moi, ce vieil homme angoissé. Lui, et ses yeux d'un bleu envoutant. Moi qui sent le rouge me monter aux joues lorsque j'y pense. J'aimerais pouvoir dire que je l'ai vu venir. La vérité c'est que jusqu'à ce repas, jusqu'à ce soir et jusqu'à ce baiser, j'étais tout simplement incapable d'envisager ce qui se trouvait pourtant sous mes yeux. Ce qui sommeillait en moi comme une ombre silencieuse, une vérité inavouée. Je savais sans voir. Je ressentais sans mettre un mot dessus. Sans vouloir comprendre.

Après ça, après la parade et la crise, et avec la désertion anticipée de Macaria, il a paru utile, nécessaire et peut-être un peu capricieux de se réunir sous un même toit. Jonah a intégré l'une des chambres du premier étage de ma maison. Il a intégré mon espace, et je crois que j'aurais été incapable de l'accepter s'il n'avait pas lui même été aussi instable que moi. Le vent rencontre la glace. La peur, l'inquiétude et l'angoisse. Ses bras autour de mes épaules et sa chaleur qui combat le froid. Son sourire à en faire fondre n'importe quel glacier. L'espace vide et anxieux sur le canapé se réduit pour nous réunir sous une même couverture. Les quelques marches d'un escalier deviennent un espace trop grand entre nos chambres lorsque la nuit vient à tomber.

Le cœur qui hurle, lorsque l'autre n'est pas là.

On penserait qu'avoir vécu avec une empathe permettrait d'être plus en accord avec ses propres émotions. Je commence à me demander si elle n'avait pas anticipé tout ça.

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